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Nous entamons une série de trois articles sur le soulèvement au Chili. Ce premier revient sur l’aube du mouvement. Le second parlera de répression et de la revendication d’une constituante. Nous finirons par un état des lieux aujourd’hui.

Une hausse du prix du ticket de transport en commun à Santiago, la deuxième de 2019, est le coût de trop. En ce début d’octobre grandit un mot d’ordre : Ne payons plus !

D’abord chez les étudiants, puis au-delà, on organise des fraudes collectives : on vient en masse et on franchit les tourniquet. Dans la station de métro de l’université, puis dans d’autres, le tout relayé sur les réseaux sociaux.
Le ton monte. Le gouvernement menace, insulte, tente de ridiculiser la lutte, qui s’amplifie, amenant à des confrontations plus fortes avec les flics et des vigiles et la fermeture de plusieurs stations.

La journée du vendredi 18 octobre est tendue, escarmouches et affrontements ; l’après-midi, les syndicats du métro affirment qu’ils ne continueront pas à travailler car leur sécurité est compromise : les lignes ferment.
Des milliers de travailleurs rentrent chez eux à pied. En chemin, ils s’arrêtent, boivent un coup et jetent quelque chose dans les feux qu’ils trouvent sur la route. Il ne s’agit plus de groupes d’étudiants : c’est tout le monde, ou plutôt, c’est la classe entière qui semble sortir de terre. Dans la nuit, l’affrontement grandi, les barricades prennent les rues, on incendie des banques, le bâtiment de l’entreprise ENEL (EDF chilienne), des stations de métro, des bus.
On apprend qu’il n’y aura pas de transport ce week-end. La télévision, vers minuit, annonce l’État d’urgence.

Demain, samedi, commence déjà. Les supermarchés sont pillés, d’autres stations de métro et des bus incendiés. Barricades dans tout le centre de Santiago et certaines de ses zones périphériques ; le soulèvement s’étend aux villes de Valparaíso et Concepción. Le couvre-feu décrété pour le soir fait les premiers morts. L’armée est dans la rue, les barricades aussi.

La nuit du dimanche, le président Piñera déclare « nous sommes en guerre et l’ennemi est puissant ». La répression s’abat encore, meurtrière, dégueulasse. Mais elle ne ne vainc pas, les gens restent et se battent.

Le vendredi 25, une manif rassemble près de trois millions de personne, mais pourquoi ? Une telle foule peut tout faire. Ici, on se contentera de piétiner, scander quelques slogans, pour une nouvelle constitution, gri-gri démocratique dont nous reparlerons bientôt. Nous sommes déjà à la fin octobre et si rien n’a changé, pour le mouvement, tout commence.

À suivre…